L’enseignement : Une montagne à soulever dans le Nord Bénin.

Le Borgou et l'Alibori à genou dans le secteur de l'enseignement secondaire.

Pendant que nous passions nos années d’enseignant et de Conseiller pédagogique dans les départements du BORGOU et de l’ALIBORI , nous avions souvent assisté impuissants à l’échec de l’enseignement que nous nous efforcions de donner à nos apprenants à cause de nombreux écueils dont certains dépassent tout entendement dans cette région de notre pays.

En effet , dans cette partie de notre pays , les établissements scolaires installés même dans les coins les plus reculés et les plus inaccessibles par la volonté des politiciens , sont dépourvus d’enseignants qualifiés. Dans la plupart des cas , seul le Directeur est agent permanent ou agent contractuel de l’état , tout le reste sont des vacataires. Et on n’en trouve même pas pour couvrir toutes les classes.On est parfois obligé de regrouper des classes pour que tous les enfants puissent suivre les cours pendant l’année scolaire.Aujourd’hui , il n’y a presque plus d’enseignants agents permanents de l’État sur le terrain. Les Contractuels sont peu nombreux et les aspirants non formés qu’on envoie dans les établissements ne sont pas du tout à la hauteur de la tâche. Les enseignants qualifiés sont concentrés dans les établissements du Sud , notamment à Cotonou et environs, et aucun d’eux ne veux entendre parler d’aller servir dans le Nord. Même affectés dans cette région réputée sauvage et inhospitalière, ce qui est archi faux sinon nous n’ y aurions pas , nous , passé toute notre carrière.

Le deuxième obstacle à l’enseignement dans le Nord Bénin est le manque de formateurs et d’encadreurs des enseignants sur le terrain.Les Inspecteurs et les Conseillers Pédagogiques en nombre très insuffisants n’arrivent pas à accéder à tous les établissements où même à y accéder à cause des grandes distances qui séparent les localités, de la dispersions de ces établissements dans des zones très vastes et enclavées, de l’inexistence des moyens roulants dont encadreurs et formateurs ont besoin pour faire leur travail. La formation est par conséquent laissée aux animateurs d’établissement qui n’ont généralement pas eux aussi la formation requise , les doyens étant allés à la retraite sans avoir eu le temps et les moyens de transmettre à la jeune génération leur savoir-faire et leurs expériences au cours des Animations Pédagogiques , désormais seul creuset pour le recyclage et la formation pédagogique. Il faut reconnaître aussi que cette jeune génération, qui n’a en tête que l’argent et pas de vocation, n’aime pas assister aux Animations Pédagogiques soi-disant non motivés.

L’autre entrave majeure de l’enseignement dans le Nord est la non considération des études par les parents qui , en tant qu’agriculteurs de père en fils et de génération en génération, préfèrent que leurs enfants aillent travailler dans les champs au lieu d’ aller à l’école. C’est pour cette raison que certains d’entre eux enlèvent leurs enfants de l’école en pleine année scolaire, refusent de payer leur contribution et leurs fournitures scolaires , marient leurs filles même si elles sont brillantes dans les études . Toutes ces choses amènent les filles à abandonner les études , à devenir des filles mères ou à se prostituer. Quant aux garçons, ils sont condamnés à faire de petits jobs pour payer leurs études , à vendre de l’essence au bord des rues ou à aller chercher fortune au Nigéria en pleine année scolaire.Il y a aussi qu’à l’approche de la saison pluvieuse , les parents , dès le mois d’avril , commencent à retirer leurs enfants des classes pour la préparation de leurs champs ou de leurs petits qui ont pour la plupart leurs propres parcelles.Ces comportement concourent à la baisse de niveau de ces élèves qui arrêtent les cours avant la fin de l’année compromettant leur chance de bénéficier de tout le programme d’études et de participer aux dernières évaluations de l’année. N’ayant pas le temps de s’occuper de leurs études , ces élèves pères ou mères , commerçants et autres , évoluent difficilement dans les études et échouent lamentablement aux examens, raison du faible taux de réussite enregistrés après lesdits examens.

À tous ces travers de l’enseignement dans le Nord s’ajoute le manque de laboratoire et de bibliothèque dans la plupart des établissements scolaires. Abandonnés par leurs parents ennemis de l’école , et l’ État qui n’arrive pas à assurer convenablement leur éducation , leur encadrement et leur formation faute de moyens, les enfants sont laissés à eux-mêmes et sont livrés à l’exode rural , à la rue et à ses dangers .

TOLOHIN Anatole , Professeur Certifié et Conseiller Pédagogique de français à la retraite.
Tél : 95 82 62 63 / 96 38 01 65
Vendredi 11/10/2024.

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